K. dort un sommeil de plomb (absurdité)

par zeio @, mardi 24 novembre 2015, 20:25 (il y a 3079 jours) @ zeio

Il tombe sur Prudence, assise sur la première marche de l’escalier, les bras croisés sur les genoux. Elle attend certainement quelque chose, ou quelqu’un. Depuis combien de temps ? Il ne sait pas si c’est lui qu’elle attend. Pendant un instant il se demande même si elle n’est pas assise ici depuis toujours. Peut-être n’avait-il pas été suffisamment attentif pour remarquer sa présence. La voyant ainsi, dans une position aussi inconfortable, il s’irrite, vocifère. *Je voulais simplement ranger ce cahier dans la remise, rien d’autre !* Nulle réponse. K. analyse la situation, explore les possibilités qui s’offrent à lui. Visiblement, il ne parviendra pas à franchir l’obstacle, il ne parviendra pas non plus à l’ignorer. Il montre le cahier qu’il tient dans sa main, comme pour prouver qu’il est bien réel, et que sa défense tient la route. *Je reprendrai ce cahier plus tard. Quand mes forces seront revenues. Je n’ai pas à me justifier !* Prudence ne semble pas à avoir l’intention de le laisser passer. Au jeu de la patience, K. a des armes à faire valoir, mais contre un tel adversaire, il se sait vaincu d’avance. Il ne peut d’ailleurs pas y avoir de combat. K. se dit qu’il aurait dû prévoir le problème qui se présente à lui. Il savait qu’à un moment ou à un autre, il serait ainsi pris au piège. Il le savait bien. C’est d’ailleurs pour cette seule raison qu’il n’avait prévu aucun système de défense pour ce type de situation. Tout ce qui peut potentiellement l’engloutir ne mérite pas d’opposition, au contraire. Pris dans ses réflexions en spirales, il ne remarque pas tout de suite que Prudence manifeste un intérêt pour le cahier, qu’elle tente de tirer à elle depuis un moment. K. le serrait machinalement entre ses doigts avant de lâcher prise. À cet instant il comprend qu’un mouvement vient de se produire, de l’intérieur vers l’extérieur. Prudence ouvre délicatement le cahier à la première page, et débute la lecture à voix haute. Sa voix résonne dans la demeure entière, suivie d’échos dont il ne peut, pour le moment, mesurer la portée.

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